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RAISON GARDER

Petit manuel de survie des vivants
dans un monde idéalisé

De nombreux lecteurs fidèles du blog encyclopédique wallonica.org ont gentiment insisté sur l’intérêt de regrouper (et de réécrire pour les harmoniser) les différents articles que j’y ai publiés sur le thème de l’expérience opposée aux idéalismes, sur la vanité, l’existentialisme, sur le risque d’essentialiser à outrance, sur la mort du dieu, la complexité personnelle, les infoxMontaignePaul Diel, le Body BuildingNietzsche ou Ernst Cassirer et… sur la Raison, qui est toujours bonne à garder. Bref, sur ‘comment lutter contre les biais cognitifs et l’aliénation qui nous empêchent de penser la vie sainement, pleinement et librement‘. Autant de thèmes de travail qui gagneraient, disaient-ils, à figurer au cœur d’un essai qui les relierait et modéliserait leur agencement avec force exemples, citations et illustrations. Qu’il en soit ainsi : essayons l’essai !

L’ouvrage s’adressera à celles et ceux qui sont “disposés à se mettre d’accord avec eux-mêmes” (Camus) et qui s’en donnent les moyens (entre autres, en lisant ce livre et en faisant de chacune des réflexions un objet de pensée). Il tient à peu près ce langage :

  • le sens de la vie (sic) ne réside pas dans la recherche d’un bonheur statique mais bien dans l’expérience satisfaisante, à savoir l’exercice d’activités au cours desquelles notre esprit est persuadé que nous sommes la bonne personne, au bon endroit… et en toute confiance ! En clair : la Joie de vivre dépend moins du plaisir fantasmé « d’être là-bas » (source de frustrations) que de la satisfaction de « bien faire ici, maintenant. »
  • Hélas, nous sommes juge et partie pour estimer si nous sommes bel et bien à notre place (si nous vivons à propos, comme nous y invitait Montaigne). Il nous faut également savoir s’il s’agit bien de nous, car nous nous regardons souvent dans le miroir… avec des écailles sur les yeux, au point que l’image que nous avons de nous-mêmes ne correspond pas toujours à notre activité effective.
  • Il faut dire que nous nous appuyons sur les avis de trois consciences fort actives, qui s’agitent pour assurer notre pérennité : une conscience noétique qui s’occupe de nos représentations du monde, une conscience auto-noétique où se promènent nos autofictions et une conscience plus élémentaire, dite a-noétique, où se logent traumas et intuitions. Ces trois consciences oscillent en permanence entre le besoin d’adhésion (« Monde, me voici !« ) et le réflexe de fuite (« Pas de ce monde-là pour moi !« ).
  • En outre, elles travaillent d’arrache-pied – chacune de son côté et en toute bonne foi – à calmer notre angoisse devant l’expérience directe, risquant à tout moment de nous emmener dans des représentations ‘aliénées‘ du monde, de nos sensations ou de notre petite personne. L’aliénation, dans ce cas, c’est ne pas être à sa place et éviter de s’en rendre compte, en se projetant dans une réalité factice.
  • Comment, dans ces circonstances, raison garder ? Car, à l’origine de notre sort, on trouvera moins le traditionnel péché de vanité qu’une angoisse primale et spontanée qui plonge ses racines dans un sentiment d’insécurité : nous ne pouvons pas maîtriser tout l’environnement dans lequel nous agissons. Nous voudrions vivre en confiance et agir comme si toutes les attentes de comportement que nous avons envers le monde ne pouvaient jamais être déçues. Hélas, qui trop embrasse, mal étreint et notre puissance personnelle ne suffit pas toujours à pallier notre déficit de confiance.
  • Dissoudre nos aliénations (fuites) et restaurer l’attention au cœur de notre être-au-monde, devient alors une tâche sans cesse renouvelée qui nous permet de ressentir la légalité de la Vie dans notre activité quotidienne : une manière simple de restaurer la confiance et de donner à notre Raison les moyens de motiver justement notre action.
  • La gravure de Grandville, Le jongleur de mondes (1844), peut nous aider à penser un modèle d’être-au-monde plus satisfaisant : nous pouvons travailler à l’appropriation de routines personnelles afin de pouvoir jongler, de jongler utile et d’aimer jongler… Ce livre détaille ces trois conditions, bien nécessaires pour retrouver la Joie d’être en vie. Quoi d’autre ?

L’auteur

Éditeur en ligne, webmestre, blogueur, formateur et traducteur, Patrick THONART est né en 1961 et vit à Liège (BE). Fort d’un curriculum vitae rocambolesque, qui l’a mené du Benelux à l’Afrique sub-saharienne, en passant par Singapour et le Québec, il a principalement été actif dans la traduction, les ressources humaines, la gestion des connaissances et la formation, en milieu académique comme en entreprise.

Parallèlement à ses projets professionnels, il a lancé dès 2000 une encyclopédie en ligne, avec des confrères québécois. En Belgique, cette initiative est devenue le blog encyclo wallon wallonica.org, dont il est l’éditeur responsable.

D’origine manouche selon les légendes familiales, il a toujours été sensible aux pièges des discours péremptoires et des certitudes. De sang hollandais par ailleurs, il a également apprécié l’approche pragmatique de l’existence chez des penseurs aussi différents que Lao-Tseu, Épicure, Montaigne, Spinoza, Nietzsche, Paul Diel ou Edgar Morin. Après avoir transposé sa formation en Psychologie de la Motivation dans sa pratique quotidienne de formateur-animateur, tant auprès de détenus condamnés à perpétuité qu’auprès d’étudiants dans l’enseignement supérieur, il s’efforce dans ce premier livre d’accompagner le travail individuel que requiert une Grande Santé, libre de pré-jugés…